Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Michel J. Cuny - Eléments d'analyse de l'économie et des finances mondiales
5 juin 2014

28 - L'épée à la rescousse du droit de propriété

   Au  sein  d'une nature  dont  la profusion dépassait largement les capacités d'absorption des divers groupements humains, et en posant le travail comme unique mesure de la valeur économique des biens produits, John Locke entrevoit la naissance d'un droit de propriété qui n'a pas encore rompu avec une sorte de socialisme primitif "naturel" : "Ainsi, je pense, on parvient très facilement à concevoir sans aucune difficulté comment le travail a pu constituer, au début, l'origine d'un titre de propriété sur les biens indivis de la nature et comment l'usage qu'on en faisait lui servait de limite. Alors, il ne pouvait exister aucun motif de se quereller pour un titre, ni d'hésiter sur l'étendue de la possession qu'il autorisait. Droit et communauté allaient de pair. Comme chacun acquérait, de plein droit, tout ce à quoi il pouvait appliquer son travail, nul n'était tenté de travailler au-delà de ses besoins."

   Cette dernière formule doit aussitôt être soulignée : il ne pouvait s'agir que de besoins stationnaires, c'est-à-dire d'un minimum vital qui satisfaisait chacun, chacune et la collectivité dans son ensemble au coeur d'une nature qui, d'ailleurs, n'offrait rien de plus.

   Il y a pourtant déjà le ver du progrès dans le fruit de la stagnation d'origine : le petit morceau de métal jaune... dont on va découvrir qu'aussitôt né il est à la tête d'un empire. Il ne reste, pour lui donner tout son pouvoir, qu'à lui adjoindre l'effectivité du droit de propriété, ce qui veut dire la garantie de celle-ci par l'instauration d'une solidarité active qui se traduit, pour les hommes, comme John Locke l'écrit, dans le fait "de se réunir afin de sauvegarder mutuellement leurs vies, leurs libertés et leurs fortunes, ce que je désigne sous le nom général de propriété."

   Cet instant est décisif, puisque, comme John Locke le souligne immédiatement : "La propriété, qui procède du droit des hommes d'user de n'importe quelle créature inférieure pour l'entretien et le confort de leur vie, n'existe qu'au profit et pour le seul avantage du propriétaire ; tant et si bien qu'en cas de besoin celui-ci peut même détruire, par l'usage qu'il en fait, la chose qui lui appartient ; mais le gouvernement, qui a pour raison d'être de sauvegarder les droits et la propriété de tous les hommes en protégeant chacun contre la violence et les actes dommageables des autres, existe pour le bien des gouvernés."

   Des gouvernés... ou plutôt de certains d'entre eux, puisque John Locke ajoute aussitôt : "L'épée des magistrats doit servir à terrifier les malfaiteurs pour que cette terreur oblige les hommes à respecter les lois positives de la société, alignées sur celles de la nature, en vue du bien public, autrement dit du bien de chaque membre de la société à titre individuel pour autant que des règles communes puissent le garantir."

   Petite voix, déjà entendue, de Voltaire sur fond d'une société de "propriétaires" bien ordonnée : "Le genre humain tel qu'il est, ne peut subsister à moins qu'il n'y ait une infinité d'hommes utiles qui ne possèdent rien du tout." Ce qui peut évidemment requérir, par instant, l'usage de l'épée contre certains "ennemis" de la propriété... C.Q.F.D.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité